Review/2002/2
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Mes cinq ressources en promotion de la santé : un cocktail qui a changé à travers le temps [English]

By Irina Dinca


Dinca, I. Mes cinq ressources en promotion de la santé : un cocktail qui a changé à travers le temps. Reviews of Health Promotion and Education Online, 2002. URL: reviews/2002/2/index.htm

Un peu de contexte

J’ai eu pas mal de difficulté à me décider sur mes ressources préférées en promotion de la santé, des ressources tout a fait différentes de celles des personnes qui ont écrit avant moi dans le cadre de cette série.

Premièrement, l’histoire de la promotion de la santé et de l’éducation pour la santé a commencé en Roumanie il y a à peine onze ans. Avant, sous le régime communiste, nous avons eu un système appellé éducation hygiénique qui était très autoritaire et qui avait peu à faire avec ce que j’ai appris depuis lors en ce qui a trait à la promotion de la santé et à l’éducation pour la santé. Donc, parce que ma carrière professionnelle dans ce champ d’action dure depuis au plus dix ans, ce n'est qu'à une courte période que je peux me référer lorsque je pense à mes ressources.

En deuxième lieu, quand j’ai essayé de retrouver certains des livres qui ont influencé ma vie professionnelle, j’ai eu du mal à les obtenir. Il y a une bibliothèque au Centre National pour la Promotion de la Santé (le seul lieu de ce genre en Roumanie) que j’ai coordonné jusque l’année dernière; mais, lorsque j’ai essayé d’y avoir accès, plusieurs de ces ouvrages avaient été prêtés. J’ai donc dû faire un solide exercice du mémoire pour me rappeler les cinq ressources qui ont eu le plus d'impact sur moi…

En troisième lieu, je dois avouer que cet article, écrit dans une revue internationale, m’a demandé plus de temps que je ne l’avais estimé au début. Dans notre coin du monde, écrire ou publier ses expériences n’est pas quelque chose d’habituel.

Finalement, voici mon texte et j’ai décidé d’utiliser les catégories suivantes pour présenter mes ressources:

  • les aspects humains: c'est ce qui m’a d'abord influencée
  • les livres, bien sûr
  • les articles, moins que je ne l'aurais souhaité
  • les documents non publiés – reçus pendant des conférences
  • les ressources électroniques – quelque chose de nouveau mais qui se développe de plus en plus en Roumanie.

L'humain

Je me rappelle mon premier travail en promotion de la santé lors d'un atelier sur l’éducation sexuelle, organisé par l'OMS-EURO en 1990 en Roumanie; j'y avais alors été … interprète. Pourquoi interprète? Après avoir terminé mes études de médecine, j’ai travaillé dans différents centres médicaux, à la recherche de la spécialité qui m'intéresserait le plus. C'est en essayant de ressusciter et de ventiler les patients, dans mes efforts de devenir une anesthésiste dans une maternité, que j’ai appris l'existence de la planification familiale. Travailler avec des gens sains – qu’est-ce qu'une médecin pouvait bien faire là dedans ?

C’est donc à travers ce travail d’interprète que j'ai eu ma première opportunité. J’avais alors eu à traduire des mots étranges, tels : promotion de la santé, éducation pour la santé, assertiveness, advocacy ou confiance en soi... C'est à ce moment que j’ai décidé que le travail à l’hôpital n’était plus pour moi. J’ai été fort intéressée par ce qu’une jeune fille blonde avait dit aux participants à propos de la prévention des maladies sexuellement transmissibles et j'ai vu là ma future carrière, au lieu de passer de longues nuits de service hospitalier.

Tout le domaine de la promotion de la santé était alors quelque chose de nouveau en Roumanie; personne n’en avait entendu en parler mais j’ai senti que c'était un domaine plein d'avenir. Travailler avec des gens sains et les aider à le rester – c’est le premier message de promotion de la santé que j’ai appris au début des années ’90, et ce message a changé ma vie professionnelle pour toujours. Après plus de dix ans de travail dans le domaine, mon amour va toujours au domaine de la planification familiale et de l’éducation sexuelle, pour des raisons à la fois personnelles et professionnelles. En effet, j’ai été une des personnes affectées par les répressions dans ce domaine sous le régime de Ceausescu: subir deux avortements illégaux et voir ta meilleure amie malade de la septicémie à cause d’un auto-avortement mal réussi m'ont marquée à jamais et m'ont fourni une raison de plus de croire qu’aider les gens à rester en santé est le meilleur choix.

Les livres

À cause des circonstances mentionnées plus haut, ce fut la plus difficile partie de ma recherche. Le premier livre à venir à mon esprit, c’était "La Nouvelle Santé Publique" d’Ashton et Seymour (1988). Selon moi, les cinq principes de la promotion de la santé y étaient mis en evidence de manière très pratique alors que j’ai eu besoin de bien plus de temps pour comprendre le sens des mots de la Charte d’Ottawa pour la promotion de la santé. Dans le livre d’Ashton et Seymour, j’ai trouvé une manière très concrète de mettre en oeuvre la promotion de la santé à travers la description de leur expérience à Liverpool.

Communiquer la vraie acception de la promotion de la santé et de l’éducation pour la santé a toujours été ma tâche la plus difficile en tant qu'éducatrice et avocate dans ce domaine. En tant qu'éducatrice la première leçon à mes étudiants de niveau avancé (Maîtrise en Santé Publique, Compétence en gestion de services de santé ou Compétence en éducation pour la santé – les seuls programmes où sont actuellement inclus la promotion de la santé et l’éducation pour la santé en Roumanie) est aussi la plus difficile. Qu’est-ce que la promotion de la santé ? Qu'est ce que l’éducation pour la santé ? Comment tout cela est-il différent des perspectives de l’éducation sanitaire qu'on avait auparavant (et a-t-on besoin de faire ces différences...): tout cela est un défi très important. Le niveau abstrait de ces concepts est difficile à la fois pour les participants, afin de les comprendre, et pour moi, afin de les expliquer. D’autre part, lorsque qu'en tant qu'avocate je travaille avec ceux qui prennent des décisions ou je tente de lever des fonds pour les programmes de promotion de la santé et d’éducation pour santé, je dois expliquer aux décideurs, qui sont le plus souvent des cliniciens, ce que je veux dire par ces étranges concepts. C'est vraiment Ashton et Seymour qui m’ont aidée le plus dans ces deux rôles, par leurs illustrations concrètes de ces concepts.

Les articles

En Roumanie, il y a un réseau national de promotion de la santé où il y a environ 150 personnes, pour un pays de plus de 22 million d’habitants. La plus part des gens dans ce réseau sont des médecins spécialistes en santé publique ou en médecine familiale; quelques-uns sont des psychologues, des linguistes (on a considéré que quelqu’un qui connaît les langues est la personne la plus indiquée pour transmettre des messages de promotion de la santé), des assistants médicaux ou des sociologues. Naturellement,  ces quelques personnes ne peuvent pas accomplir l'ensemble des tâches requises pour l’éducation pour la santé de la population tout entière et la promotion de la santé n’est pas même pas comprise dans leurs charges. Dans ce contexte, les médecins de famille devraient et pourraient jouer un rôle très important quant à la transmission des messages d’éducation pour la santé, mais ils ne sont pas préparés à le faire.

Un article d’Elizabeth Arborelius, Ingvar Krakau et Sven Bremberg (1992) intitulé "Key factors in health counseling in the consultation" m’a donné d'excellents conseils sur la manière d'impliquer les médecins de famille en éducation pour la santé. Dans la nouvelle initiative financée par l'USAID sur le développement et l’intégration des services de santé reproductive dans le réseau de services sanitaires primaires, on porte une grande attention à la formation professionnelle du médecin de famille à cet effet. L’organisation qui gère ce programme est John Snow Inc., une entreprise américaine qui m'emploie comme Coordonatrice à l'Advocacy et aux partenariats; j'y utilise l’article d'Arborelius et al. comme une ressource importante dans le processus de formation des médecins de famille (et, si j'ose le dire, de leurs formateurs aussi).

Les documents non publiés

Je viens d’un pays ou les maladies transmissibles ont été très strictement contrôlées. La Roumanie a un très bon taux d’immunisation, qui était encore plus élevé il y a dix ans quand cette intervention était obligatoire et que les enfants étaient suivis avec beaucoup de rigueur. Je crois qu'en promotion de la santé, on est encore très influencés par les idées et la mentalité du modèle épidémiologique appliqué aux maladies transmissibles.

Un de mes plus grands défis est donc de tenter d'expliquer à ceux qui prennent des décisions les différences et/ou les similitudes entre la prévention de maladies (la médecine sociale comme on l'appelle en Roumanie) et la promotion de la santé. Un document présenté par Sylvie Stachenko (1996) lors de la Deuxième Session du Comité Européen pour le Développement de la Promotion de la Santé, est longtemps resté dans ma bibliothèque jusqu’à ce que je comprenne finalement son utilité. Aujourd’hui, je trouve sa présentation très claire, mais il y eut un temps (pas si lointain, car elle a présenté ce document en 1995) où je me demandais: "où cette dame veut-elle en venir ?"  Le rapport Lalonde qu’elle évoquait dans son texte ne signifiait rien pour moi, ni non plus les autres idées et concepts inclus dans sa présentation. Au bout d’un certain temps, j’ai mis la main sur le Rapport Lalonde et cela m’a ouvert les yeux; maintenant je peux en discuter en connaissance de cause avec ceux qui prennent les décisions en Roumanie et avec les praticiens de la promotion de la santé.  Encore plus important pour moi: le document de Stachenko a été un autre outil qui m’a beaucoup aidé à rendre concrets les principes de la Charte d’Ottawa tels que mis en oeuvre au Canada, à la jonction des activités cliniques des médecins, des actions de santé publique et des interventions de promotion de la santé.

Et ce document n'est qu'un exemple de comment les liasses de papiers que je rapporte des conférences internationales peuvent devenir très importantes, bien qu'elles puissent pendant un certain temps ne sembler que du poids inutile dans ma valise !

Les ressources électroniques

Étant médecin (bien que ma première intention était de me former en psychologie, mais cela a été défendu pendant 22 ans en Roumanie), indépendamment de ma grande ouverture à la santé publique et à la promotion de la santé, j’avoue que je dois apprendre beaucoup de choses dans bien d'autres domaines, notamment sur le marché de l'emploi ou l’assistance publique mais aussi sur l’économie, l’agriculture, le commerce etc., qui sont tous des sujets ayant un grand impact sur la santé. De plus, comme avocate de la promotion de la santé dans mon pays, je dois travailler régulièrement avec le Ministère de la Santé et de la Famille, le Ministère de l’Éducation et de la Recherche ainsi que le Ministère des Jeunes et du Sport.

Il y a deux ans, j’ai lu sur une liste de discussion électronique la position de l'Union Internationale de Promotion et d'Éducation à la Santé (UIPES) sur le Commerce mondial et la santé de la population, préparée par le professeur Ronald Labonté (1999). Provenant d'un pays qui a encore malgré tout une perspective conservatrice en éducation pour la santé, un tel sujet m'a paru choquant et je n’ai pas participé au débat électronique qui a suivi partout dans le monde. Après un temps toutefois, après avoir regardé des reportages à la télé et après avoir lu plusieurs fois la position de l'UIPES, j'ai compris davantage de quoi il s’agissait et je me suis rendu compte que ce genre d'intervention était justement ce que je faisais tous les jours, dans mes contacts avec des gens de divers secteurs. Ceci est un bon exemple qui montre que c’est très important pour nous, en Roumanie, d’être liés électroniquement au reste de la planète; il peut se passer un certain temps avant que le sujet de certains débats nous semble pertinent mais y être exposés et y participer à l'occasion nous force à y penser, à y réagir et éventuellement, à en utiliser certains éléments.

En conclusion

Quand on a de nombreux besoins, comme c'est le cas en Roumanie, la tentation est forte d’essayer de tout connaître et de tout faire en même temps. Et cela est encore davantage présent quand on travaille en promotion de la santé, un sujet qui se préoccupe d'à peu près tous les sujets tout le temps - de notre vie toute entière. Après un certain temps, j’ai réalisé que tenter de tout faire n’était pas une bonne stratégie et qu'il valait mieux faire bien dans quelques domaines. Parce que la promotion de la santé est quelque chose de très personnel, avec des besoins spéciaux à des moments particuliers, j’ai finalement découvert que les ressources qui m’ont aidée le plus dans cette aventure difficile ont évolué selon les besoins et les époques.

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Bibliographie

  1. Ashton, J. and Seymour, H. (1988). New Public Health. Liverpool experience. Liverpool Press. WWW
  2. Arborelius, E., Krakau, I., & Bremberg, S. (1992). Key Factors in Health Counseling in the Consultation. Family Practice Vol.9, No.4. Oxford Press WWW
  3. Stachenko, S. (1996). Health Promotion and Disease Prevention in Canada: Approaches and Complementarities. Second Meeting of the European Committee for Health Promotion Development. Ormoz, Slovenia, 3-5 October 1996.
  4. Labonte, R. (1999). Brief to the World Trade Organization: World Trade and Population Health. IUHPE Board of Trustees e-mail discussion list.


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